Le fils de l’homme invisible de François Berléand

 François Berléand, acteur de seconds rôles décalés et porté au devant de la scène par la jeune génération, dont Guillaume Canet, François Berléand a quelque chose de décollé, de touchant dans sa manière particulière de jouer entre cynisme, dérision et bêtise crue. C’est une partie de ce personnage qu’il donne à lire dans son premier récit et, comme souvent dans l’exercice des non professionnels de l’écriture, il va s’agir de son enfance et du regard porté sur lui par les adultes.

 

 

 

Enfant a priori normalement constitué, il raconte ses interrogations d’enfant. Il perçoit mal le monde des adultes qui l’entourent et, cela tombe bien car ils ne le saisissent pas très bien non plus. Tout commence à son entrée à l’école, dans le début des années soixante, ou la société décide de dépoussiérer l’enseignement. Gaucher et dyslexique, sa famille se désole d’avoir engendré un tel enfant, sa grand-mère commence d’en faire un droitier, ou un gaucher contrarié ; et ses professeurs mettent en œuvre sa rééducation. Pour ce faire, ils lui feront faire des pages d’écriture de la main droite, sans se soucier de lui apprendre à comprendre ce qu’il fait, l’important est de devenir un vrai droitier, comment pourra-t-il exister autrement ? Exercices qui ne le font pas avancer d’un pouce dans la compréhension de ses études débutantes. D’une famille aisée, les écoles payantes seront les solutions pour ses travers que l’on n’ose pas nommer, le monde de l’imaginaire deviendra son refuge. Vivant en marge du monde, à l’abri des institutions privées et de son milieu familial protégé, les certitudes de ses rêves prendront le pas sur les réalités de la vie. L’enfant doute tant de tout et de tous, qu’il en vient souvent à soupçonner même de ses amitiés, il se cherche des modèles, il est seul, il voudrait exister. Le fossé entre lui et les autres s’en trouvera d’autant plus grand, jusqu’à lui faire intégrer des méthodes novatrices absurdes, autant qu’inadaptées, qui l’emmèneront à refuser dès lors toute forme de scolarisation. Il emprunte donc le chemin de l’école buissonnière, du vol et du mensonge. Néanmoins, il passe régulièrement dans la classe supérieure, c’est subséquemment que tout va pour le mieux, du moins le pense-t-il un temps. En grandissant il percevra que ce sont les moyens de ses parents qui lui permettent de franchir le cap de la classe du dessus. Il les soupçonnera donc de construire le monde autour de lui tel qu’il le voit. Parvenu à l’âge du baccalauréat, un psychologue, plus ouvert et patient que les autres, lui fera prendre conscience de ses erreurs, le réveil sera rude, mais bénéfique.

Ce livre me touche vraiment, car doué des mêmes déficiences, j’ai enduré les mêmes solutions désastreuses et perverses. Des collèges privés aux rêves insensés, de psychiatres en Psychologues sibyllins et contradictoires, après vingt-deux écoles en quinze ans ; j’ai dû combler mon retard seul, par correspondance et en formation continue, tout en exerçant une activité professionnelle. Au long de ce récit, j’ai éprouvé le sentiment de ne pas avoir été aussi marginal que certains le prétendaient, comme lui, mon enfance a été pourrie par un système qui se cherchait, et les contradictions de ceux qui avaient en charge mon éducation. Ce qui me navre, c’est que certaines de ces solutions sont toujours d’actualité et des enfants en font encore les frais, ma fille a manquer d’en faire l’expérience…


<” roman »>

A propos Jérôme Cayla

Chroniqueur littéraire, lecteur, auteur de deux romans : Mathilde et Trois roses blanches. Je travaille habituellement avec les services presse des maisons d'éditions Me contacter par Mail sur contact Presse pour les livres en services de presse.
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