Eldorado, de Laurent Gaudé

Ce livre n’est pas récent, mais son actualité brûle intemporellement !

L’homme grandit par ce qu’il entreprend : c’est là une constante de chacun, quelque soit son origine, sa culture ou son pays. Celui qui vit une existence aride cherche désespérément la lumière qui le sortira de sa condition, l’Eldorado de la sécurité matérielle, de la libre pensée. L’inconvénient de cette ascension restant la limitation des places disponibles ; ceux qui vivent au soleil gardent leurs frontières jalousement car le goût du partage a ses limites. La résultante devient rapidement un combat perpétuel de l’affamé contre le repu.

Il est aisé de comprendre la motivation du démuni, mais aussi celle du possédant qui défend son territoire. Entre la mort lente de la perspective de rien et l’envie d’avancer, le choix est simple : le miséreux choisira toujours de trépasser au combat. Sur la frontière, d’autres hommes livrent une guerre sans fin, essuient les drames humains, enterrent les morts, reconduisent aux limites de l’enfer, consolent les veuves et nourrissent les orphelins. Justement, parce qu’ils sont des hommes aussi, les certitudes s’émoussent, le doute vient et certains se demandent qui est le plus barbare de lui ou de l’autre, jusqu’à la saturation, l’incompréhension, au dégoût de lui-même. D’un côté il y a ceux qui renient un destin condamné, de l’autre ceux se demandant se qu’est vraiment leur motivation en dehors du rôle répressif pour lequel ils sont rémunérés.

Le commandant Salvatore Piracci, se pose tant de questions qu’il lâche sa vie à la surveillance des frontières, part sur un frêle canot à moteur sur le continent africain, devient un clandestin au pays des émigrants pour éprouver ses conviction d’homme libre. Là, il vivra l’ordinaire d’un monde parallèle au nôtre, riche en rebondissement et en surprises bonnes ou mauvaises, où l’homme a une place exigüe mais pourtant primordiale. Pour lui, ce sera l’ultime étape qui le réconciliera avec lui-même et le reste de l’humanité.

Quitter l’Afrique pour survivre, mais aussi vivre l’Afrique pour mourir enfin libre !  devient la devise du commandant Piracci.

Comme toujours, Laurent Gaudé nous conduit sur des chemins escarpés, aux limites de notre entendement, pour allumer en nous une autre forme de lumière.

 

A propos Jérôme Cayla

Chroniqueur littéraire, lecteur, auteur de deux romans : Mathilde et Trois roses blanches. Je travaille habituellement avec les services presse des maisons d'éditions Me contacter par Mail sur contact Presse pour les livres en services de presse.
Ce contenu a été publié dans Critiques littéraires, Livres, Romans contemporains, Voyages, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire